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A propos de l'auteur

  • Valérie PEREZ

    Fondatrice de ce site et auteur de la majorité des articles mis en ligne.
    Professeur agrégée et docteur en philosophie.

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Une île au soleil Texte de Stella Blackstone, Illustrations de Nicoletta Ceccoli, publié chez

Cet album met en images et en mots l’histoire d’un voyage. Des illustrations qui font rêver, des phrases en formes de vagues font de ce livre une invitation au voyage très poétique.

Le petit lecteur est amené à s’identifier au personnage principal, petit enfant anonyme qui répète « je regarde » d’une page à l’autre. Plus il avance, voguant sur les flots dans son bateau, plus son champ de vision et ses phrases s’agrandissent … jusqu’à la découverte de l’île. Ce petit personnage part seul à la découverte du monde. Et il l’observe à l’aide de sa longue vue. Le lecteur est invité à le suivre et à se reconnaître dans ce personnage qui découvre et nomme tout ce qu’il voit. L’utilisation de la première personne du singulier facilite l’entrée de l’enfant dans le livre.
Mais qu’est-ce que « regarder » ? Regarder, c’est appréhender le monde, connaître ce qui est fixe (le soleil, l’arbre, l’île) et ce qui bouge (l’oiseau, les vagues, le dauphin). C’est aussi nommer, comme nous l’avons dit plus haut, c’est-à-dire confirmer l’existence de tout ce qui est vu. Le personnage parcourt le vaste océan, pour arriver sur une petite île et y trouver un ami. L’album joue vraiment sur le symbolique : le monde est vaste et beau, mais il est agréable de retrouver un petit chez soi !

Le jeu sur ce thème du regard est multiple. Les illustrations montrent le monde sous différents points de vue. C’est d’abord l’enfant dans son bateau à la première page. La planète est arrondie, le soleil montre le bout de son nez à l’horizon, et l’enfant est au premier plan. A la seconde page, l’enfant regarde le soleil et on le voit de haut. Lorsqu’il regarde le dauphin à la troisième page le point de vue est presque au raz de l’eau. L’île apparaît ensuite au loin : nous suivons alors le regard de l’enfant à travers sa longue vue. Plus il approche de l’île, plus le plan se resserre sur le visage de l’enfant. Le lecteur découvre l’île en même temps que l’enfant, sous le même angle de vue. Enfin, il aborde l’île : l’illustration offre alors une vue d’ensemble. Tout ce que l’enfant a vu au cours de son voyage se retrouve d’une page à l’autre, tant au niveau du dessin que de la phrase qui s’allonge de plus en plus et prend la forme des vagues. La rencontre avec l’ami qui l’attend sur l’île ne contient pas de texte : l’enfant est tout à la joie de cette rencontre, les mots sont inutiles ! Après avoir joué et péché, il se demande « Que pourrais-je encore regarder ? », puis il s’endort. Il part de nuit avec son nouvel ami, la lune a remplacé le soleil, il n’y a plus de texte : le petit lecteur peut imaginer le trajet du retour : je regarde la lune dans le ciel, etc.

Pour des enfants métropolitains, cet album aura des connotations exotiques. Voici une activité sur le thème de l’île : création d’un album.

Voici donc le déroulement d’une séance sur le thème de l’îlot.

• Lecture de l’album Une île au soleil. Pourquoi commencer par la lecture ? Tout simplement pour fournir à l’enfant un cadre, un premier matériau à partir duquel il puisera les éléments nécessaires à la construction de ses phrases (vocabulaire et syntaxe) et aussi pour donner un premier élan à son imagination. L’enseignant commence toujours par lire l’album sans faire la moindre remarque, sans intervenir. Il montre les illustrations aux élèves mais ne fait pas de commentaire : c’est vraiment ici de la lecture plaisir, même si parfois l’enfant ne comprend pas tout, il se laisse bercer par la musicalité des phrases et des mots. Il faut que cette musique lui devienne familière, et elle ne le deviendra que par des lectures et relectures quotidiennes. On n’insiste pas assez sur cela : les enfants sont sensibles aux répétitions, ils aiment entendre et réentendre les histoires qui leur plaisent. Ce plaisir est un véhicule du savoir, et il faut l’exploiter au maximum. Après chaque première lecture, l’enseignant garde le silence et observe les réactions des enfants, réactions qui peuvent se manifester par leurs propres commentaires. C’est ensuite que l’on peut poser des questions de compréhensions.

• Etude de l’image. Il serait intéressant de comparer des photographies de vrais îlots avec des illustrations de l’album. Voici quelques photographies d’un îlot du lagon de Wallis dans le Pacifique :

Voici l’îlot !
Nous allons à l’îlot en bateau !
La plage de l’îlot !
A l’îlot, il y a un fale ("falé") !

On demande d’abord aux enfants de nommer ce qu’ils voient : le bateau pour aller à l’îlot, le sable pour jouer, l’océan pacifique, le lagon pour se baigner, les arbres (cocotiers, fougères, arbres à gratte, etc.) pour s’abriter du soleil, le fale pour passer la nuit, les poissons du lagon pour manger, … On fait aussi un travail sur les formes et les couleurs : quelles sont les couleurs qui dominent ? que représentent-elles ?

• Graphisme : élaboration des illustrations. On mettra entre les mains des enfants (peinture, crayons de couleurs ou feutres) du bleu pâle pour le ciel, un bleu turquoise pour l’eau du lagon, un jaune pâle pour le sable de l’îlot, un jaune plus foncé pour le soleil, et une gamme de verts pour la végétation. La maîtresse de son côté aura dessiné une fille et un garçon qu’elle aura découpés et qui serviront de support à l’invention d’une histoire.

• Créer un album en classe. On attribue des prénoms aux deux personnages (par exemple Valelia et Soane qui sont des prénoms wallisiens) et on met les photographies dans l’ordre : la vue de l’îlot, le bateau, puis les autres comme les enfants le souhaite. Les élèves racontent le départ des deux enfants en bateau puis imaginent, guidés par le maître, leur journée à l’îlot : trouver des coquillages pour s’amuser, trouver du bois pour faire un feu, pécher du poisson, faire le repas, installer les nattes sous le fale, se reposer, jouer avec le sable, se baigner, puis repartir. Le maître note ce que disent les enfants au tableau, il corrige à l’oral leurs phrases, propose d’autres manières de s’exprimer. Au milieu du CP et en CE1, les enfants recopient l’histoire sur un livret : une page pour le texte et une autre pour le dessin. Chaque enfant réalise ainsi son album. En grande section, le maître donnera aux élèves un livret dans lequel il aura dactylographié en lettres majuscules le texte créé ensemble.

Les élèves de toutes les sections seront fiers d’avoir réalisé cet album. Il permet de les faire entrer dans la lecture et l’écriture par le biais d’une activité ludique qui suscite l’imagination tout en étant axée sur des activités de langage. Il présente aussi l’intérêt de montrer aux enfants que l’on écrit toujours un texte avec un objectif précis, ici conter. Cela oblige à sélectionner le vocabulaire adéquat, à faire l’effort de structurer son propos : l’histoire a un début, un milieu et une fin : c’est ce que l’on appelle le schéma narratif. Cette notion aura été vue avec les élèves dès la lecture de l’album, grâce aux questions de compréhension. C’est un travail à faire à chaque lecture d’album. Il permet aux enfants de se familiariser avec les notions de temps et d’espace, et de maîtriser les connecteurs logiques qui structurent l’histoire. Même chose pour les temps du récit, les pronoms de reprise (qui permettent de s’assurer que l’enfant a bien compris de qui et de quoi on parle).