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A propos de l'auteur

  • Valérie PEREZ

    Fondatrice de ce site et auteur de la majorité des articles mis en ligne.
    Professeur agrégée et docteur en philosophie.

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Etude du préambule des Confessions

Ce texte est le début des Confessions de Rousseau philosophe du XVIII ème siècle. Cette œuvre est considérée comme le modèle de toute autobiographie. En effet, l’auteur affirme son projet de dire toute la vérité sur sa vie, de raconter ses faiblesses comme il racontera ses moments de gloire. C’est à partir de cette œuvre que Philippe Lejeune a établi la notion de pacte autobiographique. Cette notion met en évidence la relation entre l’auteur et le lecteur. L’auteur s’engage à écrire un texte dans lequel le mensonge romanesque n’aura pas sa place. L’écriture est ici synonyme de vérité, et de vérité sur soi.

D’autres auteurs avant Rousseau ont écrit sur eux-mêmes : Villon, Montaigne, Saint-Augustin, mais aucun n’a véritablement fait de l’écriture personnelle un genre à part entière.

Nous étudierons dans cet extrait la notion de pacte autobiographique et les enjeux de l’écriture de soi.

Dès le début, Rousseau montre que son projet autobiographique n’eut jamais d’égal : « Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple, et dont l’exécution n’aura point d’imitateur. » Il a parfaitement conscience d’écrire un genre nouveau, qu’il ne cessera, toute sa vie, d’approfondir : Les Rêveries du promeneur solitaire, Rousseau juge de Jean-Jacques, et des lettres, comme la lettre à Monsieur de Malesherbe.

L’écriture personnelle se dote d’une fonction philosophique. A travers son portrait, c’est le portrait de tous les hommes que Rousseau envisage de faire. Il ne s’agit pas seulement de raconter des faits anecdotiques sur sa vie, il s’agit aussi d’étudier l’âme humaine : « Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de sa nature. » On reconnaît aisément le vocabulaire du philosophe : connaître la nature de l’homme, ou l’homme dans l’état de nature, furent les préoccupations de Rousseau.

Très vite, le discours autobiographique et philosophique acquiert une dimension morale à caractère religieux. Le lecteur comprend alors le titre de l’œuvre, qui rappelle celui de Saint-Augustin : « Que la trompette du Jugement dernier sonne quand elle voudra ; je viendrai ce livre à la main me présenter devant le souverain juge. » Il apparaît ici clairement que Rousseau a écrit pour se justifier aux yeux de Dieu comme aux yeux des hommes. Cette justification passe par une volonté de « transparence » (expression de Starobinski) : « Voilà ce que j’ai fait, ce que j’ai pensé, ce que je fus. » Cette volonté de transparence est problématique. Rousseau s’en rend déjà compte : comment la mémoire peut-elle être suffisamment fiable pour permettre à l’auteur de raconter toute sa vie ? Car l’autobiographie, c’est bien ce désir de tout dire, de raconter sa vie depuis son commencement, d’évoquer ses origines, jusqu’au moment de la vieillesse qui est le temps de l’écriture.

L’auteur des Confessions a résolu dans l’écriture le problème de la fiabilité de la mémoire et des souvenirs : « j’ai pu supposer vrai ce que je savais avoir pu l’être, jamais ce que je savais être faux. » On le voit ici, la vérité autobiographique n’est pas synonyme de vérité des faits mais plutôt de sincérité, de bonne foi de l’auteur. L’autobiographie est donc autant un genre qu’une forme d’écriture : Rousseau définit l’écriture du souvenir défaillant comme « quelque ornement indifférent ». Voilà une expression pour le moins étonnante ! Ces ornements dont parle l’auteur ne sont-ils pas des mensonges, puisqu’ils ne parlent pas de faits réels ?

La fin de cet extrait est une prière, une adresse à Dieu à qui Jean-Jacques recommande son œuvre. Il appelle les hommes à ne le juger que sur ce qu’il aura dit dans ses Confessions, et à ne pas tenir compte des propos calomnieux qui circulent à son sujet. Mais surtout, Rousseau en appelle à ses lecteurs : « qu’ils écoutent mes confessions, qu’ils gémissent de mes indignités, qu’ils rougissent de mes misères » . Rousseau invite ses lecteurs à partager sa vie à travers son écriture, et c’est peut-être là le véritable dessein de l’autobiographie.

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  • Etude du préambule des Confessions de Rousseau

    25 mai 2014, par azuma62

    ton article ma aidé à faire une fiche Histoire Des arts.
    Et vu que s’était plus qu’urgent je te remercie beaucoup sa ma grandement aidé.

  • Etude du préambule des Confessions de Rousseau

    12 octobre 2008, par Henri IV

    N’y a t il pas une sorte de vanité de Rousseau que l’on retrouve chez Monataigne ? Une superiorité que seul Dieu peut maîtriser ?

  • > Etude du préambule des Confessions de Rousseau

    4 juin 2007

    Vous ne mettez en évidence que la vérité et la sincérité prétendue de Rousseau et n’évoquez pas le flagrant plaidoyer pour lui-même qui traduit un travestissement de la réalité par Rousseau au service de son projet de justification. Ce point me semble pourtant important dans une étude , d’autant qu’il souligne les limites du genre, montrant la dificulté du respect du pacte autobiographique.

    • > Etude du préambule des Confessions de Rousseau

      6 juin 2007, par Noémie

      Il y a également un double paradoxe qui se dégage de ce livre :
      Paradoxe quant au destinataire, il dit s’adresser "au lecteur" mais montre sa supériorité : "que quelqu’un ose dire "je fus meilleur que cet homme là"(...)" et entend par làqu’il est unique, que son oeuvre est unique, donc qu’une seule personne est capable de le juger : Quelqu’un d’unique, D ieu.
      Paradoxe quant àla sincérité : Il dit qu’il sera sincère, qu’il ne dira "ni plus, ni moins" que la vérité, mais pourtant affirme qu’il aura recours à"quelques ornements" en cas d’oubli.
      Cet aspect est très important àsouligner dans ce préambule, car il révèle l’mabiguité du destinataire, ainsi que les limites du pacte autobiographique, de sa sincérité.

  • > Etude du préambule des Confessions de Rousseau

    17 mai 2007, par gattuso

    merci beaucoup de m’avoir aidé àn réviser pour mon bac blanc !!!